Audrey Favre est traductrice indépendante de l’anglais et de l’italien vers le français. Elle traduit et révise des articles de presse sur l’actualité, des rapports pour des organisations internationales comme l’UNICEF ou l’OCDE, et surtout du contenu éditorial : romans, livres de recettes et beaux livres pratiques principalement axés sur l’art et le design. Elle compte une trentaine d’ouvrages parus et une dizaine à paraître en 2017.
Pourquoi as-tu décidé de te mettre à ton compte ?
J’ai toujours plus ou moins été à mon compte hormis lors de mes stages ; pour payer mes études, j’étais correspondante locale de presse, puis traductrice à temps partiel en portage salarial. Par ailleurs, en traduction, les postes de salariés sont rares et concernent surtout la gestion de projets. Or, ce qui me motivait, c’était de traduire.
J’ai créé mon entreprise le lendemain de l’obtention de mon diplôme en traduction. Je ne crois même pas m’être posée la question, être à mon compte coulait de source : ce choix était dans le prolongement direct de ce que j’avais fait jusque-là, correspondait à mes envies professionnelles et était aussi en phase totale avec mon caractère.
Quel est pour toi le plus grand avantage à travailler en freelance ?
Je fais partie de cette frange d’indépendants introvertis de la pire espèce qui n’aiment rien tant qu’être seuls chez eux et ne pas avoir de hiérarchie, travailler en pyjama avec un chat sur les genoux et un chien sur les pieds.
Quand je ne suis pas d’humeur casanière, j’ai la bougeotte. L’autre immense avantage du statut d’indépendant est que je peux l’exercer depuis n’importe quel endroit relié à Internet, avec quelques petits aménagements. Je réponds d’ailleurs à ces questions depuis le Guatemala, où je me suis délocalisée au mois de novembre, après avoir émigré au Canada en 2014 tout en gardant une clientèle majoritairement européenne. La mondialisation a du bon dans mon secteur, puisque rien ne m’oblige à rencontrer mes clients.
Assumer seule la responsabilité d’une entreprise peut être impressionnant, mais ce surcroît de responsabilités entraîne aussi une plus grande liberté : celle de choisir ses projets, ses horaires, son lieu de vie.
Quelles difficultés rencontres-tu en tant que freelance que tu ne rencontrais pas en tant que salariée ?
Au quotidien, le plus dur pour moi est de m’obliger à m’arrêter de travailler pour garder un bon équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Ne pas avoir d’horaires a du bon pour m’évader au soleil l’après-midi, mais cela peut devenir une spirale infernale quand on oublie que les soirées et les week-ends sont d’abord faits pour se reposer.
Cela dit, j’apprécie d’avoir des semaines de travail assez condensées avec une pression saine, qui s’approchent plus des 45 que des 35 heures. Ce rythme me permet de partir en voyage plus souvent tout en gardant des revenus qui correspondent à mes besoins.
A quoi ressemble ta journée de travail type ?
Comme bien des indépendants, je n’ai pas forcément de journée type. Je commence à travailler vers 8 h et j’arrête aux alentours de 20 h. Entre les deux, il y a forcément au moins deux longues promenades avec mon chien, une pause déjeuner qui peut aller de 20 minutes à 2 heures selon mon planning ou une pause café vers 17 heures… Une ou deux fois par semaine, je sors travailler dans un café ou à la bibliothèque.
Quand mon calendrier est chargé ou quand j’ai profité d’une belle après-midi ensoleillée, je n’hésite pas à remettre le couvert après 21 heures.
Que pensent tes proches de ton statut ?
Lorsque j’ai commencé à être traductrice à temps partiel, pendant mon diplôme en traduction, je souffrais d’un manque de crédibilité : ma famille avait tendance à me considérer, au choix, comme une saltimbanque ou une entrepreneure au foyer. Puisque je suis finalement toujours fidèle au poste dix ans après, j’imagine avoir gagné leur respect, avec de la curiosité et peut-être bien une petit pointe d’envie.
Pour l’anecdote, je fais office de « référence indépendante » dans mon entourage et on me sollicite relativement souvent pour des conseils sur la création d’une activité, qu’elle soit à temps plein ou partiel. J’adore partager des astuces pratiques et donner envie aux autres de se lancer à leur tour.
Si tu avais quelque chose à répondre aux personnes qui trouvent que « tu as beaucoup de chance », que leur dirais-tu ?
Où s’arrête la chance, où commence le travail ? J’ai eu de la chance, c’est indéniable, lorsque mon CV est arrivé sur le bureau de certains clients au moment où ils cherchaient des professionnels avec mon profil.
Mais derrière la chance, il y a aussi beaucoup d’efforts, beaucoup de journées, soirées et week-ends passés à travailler, prospecter et démarcher. Je m’efforce de provoquer la chance, que ce soit en démarchant activement des clients qui m’intéressent ou en leur proposant des projets. J’ai décroché ma première traduction de roman en le proposant à l’éditeur.
On pourrait penser que j’ai « beaucoup de chance » d’aller travailler au Guatemala, ou d’aller me promener la journée. Mais au final, il s’agit simplement de faire des choix qui nous ressemblent.
Quant au statut d’indépendant, il est ouvert à tous : même si tout le monde n’a pas le tempérament pour être son propre patron, j’encourage tous ceux qui en ont envie de sauter le pas et d’y goûter à leur tour.
Une petite citation pour la fin… Quel est ton leitmotiv ?
Rien n’est impossible 🙂
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